Il y a indéniablement un air de "déjà-vu" dans la situation que connaît le Niger depuis mercredi. Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger devient le troisième pays du Sahel miné par les attaques de groupes liés à l’État islamique et à Al-Qaida, à connaître un coup d’État depuis 2020.
"Nous, Forces de défense et de sécurité (FDS), réunis au sein du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), avons décidé de mettre fin au régime que vous connaissez", celui du président Bazoum, a déclaré la nuit dernière le colonel-major Amadou Abdramane, entouré de neuf autres militaires en tenue. "Cela fait suite à la dégradation continue de la situation sécuritaire, la mauvaise gouvernance économique et sociale", a-t-il ajouté à la télévision nationale.
L’officier putschiste a affirmé "l’attachement" du CNSP au "respect de tous les engagements souscrits par le Niger", rassurant également "la communauté nationale et internationale par rapport au respect de l’intégrité physique et morale des autorités déchues conformément aux principes des droits humains".
"Toutes les institutions issues de la 7e République sont suspendues, les secrétaires généraux des ministères se chargeront de l’expédition des affaires courantes, les Forces de défense et de sécurité gèrent la situation, il est demandé à tous les partenaires extérieurs de ne pas s’ingérer", a-t-il indiqué en outre dans la déclaration.
Certes en ce jeudi matin, une partie du régime (sans le président Bazoum toujours retenu par les mutins de sa garde présidentielle) tente de convaincre qu’il conserve le pouvoir : "Nous sommes les autorités légitimes", a ainsi affirmé le chef de la diplomatie nigérienne dans un entretien à France 24.
Mais c’est oublier que les forces de sécurité n’ont pour l’instant rien tenté contre les mutins et que leur loyauté au régime est désormais discutable. D'ailleurs dans un communiqué du 27, l'état-major des Armées a décidé de "souscrire à la déclaration des FDS":
Les partenaires extérieurs sont évidemment aux abois.
Une médiation ouest-africaine est en cours pour trouver une solution à ce coup d’État dénoncé par l’ensemble des partenaires du Niger.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres avait pu parler avec le président Bazoum pour lui exprimer son "soutien total" et "sa solidarité". Mercredi, Antonio Guterres a condamné "fermement le changement anticonstitutionnel de gouvernement" au Niger, a fait savoir son porte-parole Stéphane Dujarric. "Profondément troublé" par la détention du Président Mohamed Bazoum par des membres de la Garde présidentielle, il a appelé "à la cessation immédiate de toutes les actions qui sapent les principes démocratiques au Niger", a ajouté Dujarric.
La Maison Blanche a exigé "spécifiquement que les membres de la garde présidentielle libèrent le président Bazoum et s’abstiennent de toute violence", rappelant que le Niger est "un partenaire crucial" pour les États-Unis. Depuis la Nouvelle-Zélande où il est en déplacement, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a lui aussi appelé à la "libération immédiate" de Mohamed Bazoum. "Je me suis entretenu avec le président Bazoum plus tôt dans la matinée et je lui ai dit clairement que les États-Unis le soutenaient résolument en tant que président démocratiquement élu du Niger. Nous demandons sa libération immédiate", a déclaré Antony Blinken. Le chef de la diplomatie américaine, qui était au Niger le 16 mars dernier pour renforcer le partenariat entre les deux pays, a conditionné la poursuite du versement de l’aide américaine au Niger au "maintien de la démocratie".
La France a condamné "toute tentative de prise de pouvoir par la force" au Niger, a déclaré de son côté la ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna dans un message publié sur Twitter.