Aller au contenu
AIR-DEFENSE.NET

Wallaby

Members
  • Compteur de contenus

    21 728
  • Inscription

  • Dernière visite

  • Jours gagnés

    66

Tout ce qui a été posté par Wallaby

  1. https://jamestown.org/program/ever-more-russians-write-putin-complaining-about-impact-of-war-in-ukraine/ (7 décembre 2023) Le Kremlin continue de publier des rapports mensuels sur les lettres envoyées à Poutine (Letters.kremlin.ru, consulté le 7 décembre). Ces rapports détaillent le nombre de lettres reçues et la manière dont ces plaintes ont été distribuées aux différents ministères. C'est assez frappant, étant donné que le régime de Poutine a bloqué la diffusion de tant d'autres sources d'information sur l'attitude des Russes à l'égard de la guerre. Ces plaintes envoyées au ministère de la Défense, une indication de la préoccupation de la population pour les questions militaires, ont explosé, passant de 2 300 lettres pendant toute l'année 2018 à plus de 80 000 en 2022 (Istories.media, 9 juin 2022). Le rapport d'enquête d'Important Stories ajoute que le nombre total de ces plaintes a atteint 180 000 depuis le début de l'invasion élargie de Poutine en février 2022, un chiffre qui suggère que le nombre de ces lettres continuera d'augmenter et à un rythme supérieur à l'augmentation du nombre de soldats russes envoyés en Ukraine. Le fait que le haut commandement russe n'accorde pas de permission aux soldats sous contrat est un point particulièrement sensible. Les premières plaintes écrites à ce sujet sont apparues à la fin de l'année 2022. En avril 2023, selon Important Stories, les lettres sur ce sujet étaient plus nombreuses que toutes les autres. Un autre sujet sensible concerne le sort des commandants portés disparus en Ukraine. Une troisième question qui agite ceux qui écrivent à Poutine au sujet de la guerre concerne l'insuffisance des traitements médicaux pour les personnes blessées au combat.
  2. https://www.i24news.tv/en/news/international/europe/1699872592-is-france-inadvertently-arming-israel-s-enemies-analysis (14 novembre 2023) La politique française dans le Caucase et au Moyen-Orient conduit à renforcer la Russie et les milices pro-iraniennes "Pourquoi les États-Unis et l'OTAN gardent-ils le silence sur la vente indirecte par la France de technologies militaires sensibles à la Russie par l'intermédiaire de l'Arménie ? La même technologie militaire a été donnée à l'Ukraine, ce qui signifie que la France sape la défense aérienne de l'Ukraine". Cette question a été soulevée par Taras Kuzio, chercheur associé à la Henry Jackson Society. Expert de la Russie et de la guerre actuelle en Ukraine, M. Kuzio a été choqué par la décision du ministre français de la défense, Sébastien Lecornu, de fournir à l'Arménie trois radars tactiques de défense aérienne à moyenne portée, le Ground Master 200 (GM200) de Thales, ainsi que des missiles antiaériens Mistral. Pour M. Kuzio, ce raisonnement est absurde. "L'Arménie est un membre fondateur de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), créée par la Russie au début des années 1990 pour faire contrepoids à l'OTAN. Les forces armées russes assurent la défense aérienne de l'Arménie avec un nombre nominal d'Arméniens", note-t-il, soulignant qu'en 2003, le Service fédéral russe des gardes-frontières a été placé sous la supervision du FSB (Service fédéral de sécurité de la Russie). Toutes les armes modernes françaises seront donc librement accessibles aux services secrets russes". https://www.geopoliticalmonitor.com/what-are-frances-motives-in-the-south-caucasus/ (5 décembre 2023) On peut raisonnablement se demander pourquoi un membre de l'OTAN vend des technologies de pointe à un membre de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) dirigée par la Russie. Le contrôle opérationnel exercé par la Russie sur les défenses aériennes de l'Arménie fait qu'il est certain que l'armée russe examinera cette technologie et peut-être même se l'appropriera. Ces relations augmentent la probabilité que le système soit inspecté et soumis à une ingénierie inverse par l'Iran, allié de l'Arménie (et de la Russie), qui a déjà pénétré de manière significative le complexe militaro-industriel arménien. L'Iran a également exporté des drones et des capacités de fabrication de drones à la Russie pour les utiliser contre l'Ukraine. Malgré l'absence du Premier ministre arménien Nikol Pashinyan au sommet de l'OTSC de novembre 2023, et malgré ses critiques sur l'inaction de l'organisation face aux précédentes demandes d'assistance de l'Arménie, Erevan n'a pas entamé de procédure légale de sortie de l'OTSC. En effet, le vice-ministre arménien des affaires étrangères, Vahan Kostanyan, a déclaré aux journalistes le 9 novembre que l'Arménie ne discutait même pas de la procédure légale de sortie de l'OTSC. Certains observateurs occidentaux ont suggéré que l'Arménie pourrait inverser son orientation militaire et sécuritaire et rejoindre l'OTAN et l'UE. Ce point de vue ignore non seulement la domination russe de l'économie arménienne mentionnée ci-dessus, mais aussi la base militaire russe de Gyumri, qui compte 3 000 soldats russes, ainsi qu'une autre base aérienne avec un escadron d'hélicoptères d'attaque à l'aéroport d'Erebuni, à huit kilomètres du centre d'Erevan. Elle ignore également le fait que le service des gardes-frontières du FSB russe est responsable de la quasi-totalité des frontières internationales de l'Arménie. En outre, l'accord bilatéral sur le stationnement des troupes russes en Arménie court jusqu'en 2044 et, selon ses termes, aucune des parties n'a le pouvoir d'y renoncer unilatéralement. Par conséquent, l'idée que l'Arménie occidentalise sa dépendance en matière de sécurité, même si, à un certain niveau, Pashinyan peut souhaiter le faire, est illusoire.
  3. Pour apaiser les tensions, je propose que le Vénézuela et le Guyana adhérent au traité de non-prolifération des énergies fossiles : https://www.cncd.be/Un-Traite-de-Non-Proliferation-des L’idée du traité de non-prolifération des combustibles fossiles s’appuie sur trois principes fondamentaux que sont la non-prolifération, l’abandon graduel de l’exploitation et la transition juste. La « non-prolifération » consacre l’arrêt progressif de la prolifération du charbon, du pétrole et du gaz et la fin de toute nouvelle activité d’exploration et de production. L’Agence internationale de l’énergie le rappelle : « Il y a une opportunité pour un avenir viable mais elle nécessite qu’à partir d’aujourd’hui il n’y ait plus d’investissement pour de nouveaux projets d’approvisionnement ». « L’abandon graduel » signifie une suppression progressive des stocks et l’arrêt de la production de combustibles fossiles. Au vu des chiffres de 2018, il est estimé que 60% du pétrole et du gaz ainsi que 90% du charbon doivent rester dans le sol pour respecter les objectifs climatiques. La première étape nécessite d’identifier les réserves et de limiter l’extraction.Grâce aux données collectées par les firmes pour des raisons environnementales (licence, administration) et de profits, les quantités de combustibles sont plus facilement traçables que les gaz à effet de serre. Enfin, le troisième principe est la « transition juste » qui sera nécessaire pour limiter les dégâts sociaux liés à la sortie des énergies fossiles.
  4. J'admire le pragmatisme et l'habileté diplomatique des Chinois, capables d'avoir de bonnes relations à la fois avec la junte et avec les rebelles : https://www.irrawaddy.com/specials/myanmar-china-watch/myanmar-junta-asks-china-to-pressure-brotherhood-alliance-to-end-offensive.html (7 décembre 2023) La Chine exerce une influence sur certains groupes armés ethniques du Myanmar situés près de sa frontière, notamment les membres de la Brotherhood Alliance. Deux semaines avant la visite de Than Swe en Chine, le régime a autorisé des manifestations anti-chinoises à Naypyitaw et à Yangon, au cours desquelles des nationalistes soutenus par la junte ont accusé Pékin de tenter de détruire le Myanmar en vendant des armes à des organisations armées ethniques basées près de sa frontière dans le nord du pays, ainsi qu'aux forces de défense du peuple. Min Aung Hlaing a également déploré, lors d'une réunion d'urgence du Conseil national de défense et de sécurité le 8 novembre, que les positions de la junte dans le nord de l'État Shan soient bombardées principalement par des drones fabriqués en Chine, qui peuvent être facilement achetés au Myanmar. Mais une semaine plus tard, le régime a changé de ton et a proclamé à plusieurs reprises qu'il entretenait des relations "solides et amicales" avec Pékin, affirmant que ces liens ne feraient que se renforcer au fil du temps.
  5. https://asialyst.com/fr/2023/11/10/birmanie-junte-combats-nord-epiphenomene-debut-fin/ Dans le Nord-Est birman, un trio déterminé et opérationnel de groupes ethniques armés (MNDAA, TNLA, Arakan Army) hostiles au régime militaire et composant la Brotherhood Alliance (BA), engageait sans préavis l’inédite « opération 1027 ». Une opération à l’origine officiellement destinée à débarrasser l’État Shan d’une myriade d’entreprises sino-birmanes mafieuses en tous genres. Elles proliféraient en toute impunité ces dernières années, et mécontentaient notamment l’irritable République populaire de Chine voisine. Jusqu’alors, les trois composantes ethniques de la Brotherhood Alliance (BA) ne s’étaient pas directement placées derrière la bannière fédérative du NUG [National Unity Government]. C’est désormais chose faite. La BA se fixe dorénavant comme objectif ultime le renversement du régime militaire. La Kachin Independence Army (KIA) et la KNDF se coordonnent à présent avec la BA. Selon la presse birmane, dans l’ouest du pays, la junte a consolidé ses positions dans les villes de l’État d’Arakan lors de la semaine écoulée et aurait notamment en point de mire prochain les forces de l’Arakan Army (AA). Du 7 au 9 novembre, la marine birmane et son homologue russe effectuaient des manœuvres communes en mer des Andaman. Mardi 7 novembre, selon l’ambassade de Chine en Birmanie, les autorités chinoises et birmanes paraphaient divers accords d’achat d’électricité.
  6. Des spéculations sur la disgrâce du ministre des affaires étrangères Qin Gang : https://www.politico.eu/article/chinas-paranoid-purge-xi-jinping-li-keqiang-qin-gang-li-shangfu/ (6 décembre 2023) Le 25 juin de cette année, six mois à peine après avoir été nommé ministre, M. Qin a tenu des réunions à Pékin avec les ministres des affaires étrangères du Sri Lanka et du Viêt Nam, ainsi qu'avec le vice-ministre russe des affaires étrangères, M. Andrey Rudenko. Puis il a disparu. Selon plusieurs personnes ayant accès à des fonctionnaires chinois de haut niveau, la véritable mission de Rudenko à Pékin était d'informer Xi que son ministre des affaires étrangères et plusieurs officiers supérieurs de l'APL avaient été compromis par des agences de renseignement occidentales. À la suite de sa disparition, des récits macabres sont apparus sur la liaison de Qin avec une journaliste de la chaîne chinoise Phoenix TV, Fu Xiaotian, avec laquelle il aurait eu un fils, citoyen américain. Ces histoires ont largement circulé en ligne avec l'accord apparent des cybercenseurs chinois. Fu a fréquenté l'université de Cambridge, un terrain de recrutement traditionnel pour les agences de renseignement britanniques, et a rencontré Qin pour la première fois il y a plus de dix ans, alors qu'il était en poste à l'ambassade de Chine à Londres. En 2016, le Churchill College, l'alma mater de Fu à Cambridge, a donné son nom à un jardin en remerciement de sa "très rare ... série de cadeaux généreux", dont le montant s'élèverait à au moins 250 000 £, une somme énorme pour la plupart des journalistes. Avant que le ministre des affaires étrangères ne disparaisse, Fu avait quasiment désigné Qin comme le père de son enfant sur les médias sociaux. Puis, en avril, elle est retournée à Pékin à bord de ce qui semble être un jet privé affrété par le gouvernement et n'a plus donné de nouvelles depuis. Le système de propagande chinois laisse fortement entendre que la liaison et l'enfant américain illégitime sont les raisons de la purge de Qin.
  7. https://americarenewing.com/issues/policy-brief-pivoting-the-us-away-from-europe-to-a-dormant-nato/ (16 février 2023) Comme indiqué plus haut, l'expansion de l'OTAN était une décision idéologique prise à l'apogée de l'unipolarité de l'après-guerre froide et était vouée à ne pas être soutenable à long terme. Comme la plupart des bureaucraties, l'organisation supranationale s'est développée pour survivre. Elle s'est transformée d'une alliance militaire en un groupe idéologique et politique, trouvant simultanément de nouvelles tâches pour maintenir son existence tout en sapant la pensée stratégique nationaliste ou indépendante de ses États membres. Enfin, l'expansion de l'OTAN a entravé le partage du fardeau européen de deux manières principales. Elle a entraîné un parasitisme perpétuel pour les puissances occidentales, qui ne voyaient aucune menace se profiler à l'horizon. Elle a également donné naissance à un certain nombre de protectorats orientaux, dont la survie dépend de manière insoutenable de grandes puissances étrangères. Pourtant, ils sont souvent des internationalistes idéologiquement libéraux, extrêmement moralisateurs et enclins à prendre parti dans les débats internes de leurs grandes puissances étrangères bienfaitrices. Dans ce contexte, il est essentiel de se rappeler que le transfert du fardeau en Europe est plus facile à gérer que le partage forcé du fardeau. Le partage du fardeau est un processus de collaboration qui risque de dérailler à cause des protectorats régionaux enracinés en Europe et de la bureaucratie de l'OTAN. Le transfert du fardeau est un exercice unilatéral du pouvoir motivé par les intérêts américains. Il fournit un calendrier rapide et ferme, forçant l'Europe à planifier des ressources et des alternatives. L'Europe n'est pas confrontée à une menace comparable à celle qu'elle a connue pendant la guerre froide, et les capacités européennes combinées dépassent de loin celles de la Russie. Il est dans l'intérêt de l'Europe de défendre des frontières européennes finies. Une OTAN en sommeil signifierait un moratoire complet sur les activités qui ne relèvent pas d'un mandat strictement militaire et ne maintiendrait que les structures organisationnelles qui seraient nécessaires et activées dans le cas d'une guerre majeure. L'OTAN devrait également cesser toute expansion. Un bloc en constante mutation et en expansion ne peut avoir une grande stratégie cohérente. L'OTAN ne sert pas la défense globale du bloc. Elle sape l'intérêt national (même les formes légères de nationalisme bienveillant et de hiérarchisation des États membres), en particulier chez l'hégémon, par le biais d'une bureaucratie soviétique autonome en constante expansion et de groupes de pression étrangers. Elle encourage les protectorats à influencer la politique intérieure et étrangère des grandes puissances. Elle aboutit au parasitisme et au chaos stratégique. La transformation de l'OTAN d'une alliance de défense en une bureaucratie idéologique doit être inversée de toute urgence, et une frontière finie pour le bloc est la première condition préalable. À terme, la création probable de mini-ententes entre les différentes puissances locales et les équilibristes pourrait éliminer complètement la nécessité d'une alliance transatlantique du type de l'OTAN. En conséquence, le gouvernement des États-Unis ne devrait jamais écarter la possibilité d'un retrait total de l'OTAN. Les décideurs politiques devraient également être prêts à exercer cette option, en particulier si les membres européens de l'OTAN ne prennent pas de mesures substantielles pour procéder à un transfert de charges. Les puissances européennes sont tout à fait capables de garder les frontières de l'Europe. La force de réaction rapide de l'OTAN est en passe de s'étendre. Toutefois, il serait prudent de doter cette force uniquement d'une infanterie et d'une logistique européennes, sous un commandement européen au sein de l'OTAN. L'OTAN devrait immédiatement renoncer aux opérations hors zone, et les membres européens de l'OTAN devraient garder les frontières et les masses continentales européennes. L'envoi par l'Allemagne ou les Pays-Bas de frégates occasionnelles dans le Pacifique n'améliore en rien la sécurité de l'Asie et n'indique pas un partage plus intelligent du fardeau. Les frégates européennes qui patrouillent dans la mer Baltique constituent une meilleure utilisation des maigres ressources. Les pays scandinaves sont tout à fait capables d'assurer la sécurité dans l'Arctique, le renseignement d'origine électromagnétique (SIGINT) et de patrouiller dans les mers de Béring, Méditerranée et Baltique. Les capacités sous-marines de la marine suédoise sont parmi les meilleures de leur catégorie dans le monde. La France et la Grèce sont déjà en train de gérer la défense de la Méditerranée dans le cadre de leur pacte de défense bilatéral. De même, il existe des accords de sécurité entre la Pologne et la Grande-Bretagne et des discussions sur le stationnement permanent de l'armée allemande en Lituanie. Bien que prématurés, ces accords offrent aux États-Unis la possibilité de se retrancher partiellement. Suite à la dégradation des forces conventionnelles russes, il n'est pas nécessaire que les États-Unis déploient des unités blindées d'infanterie ou de soutien au combat en Europe de l'Est. Toutes les brigades d'infanterie et les unités logistiques déployées en permanence en Europe de l'Est devraient être européennes dans leur combinaison et leur commandement. La Pologne est en passe de devenir la plus grande force européenne de l'OTAN après la Turquie. Dans le même temps, la Finlande dispose d'importantes réserves d'infanterie et l'Allemagne peut reprendre son rôle d'épine dorsale blindée de l'OTAN de l'époque de la guerre froide.
  8. https://www.lefigaro.fr/international/guerre-en-ukraine-les-nouvelles-promesses-d-aide-occidentale-sont-au-plus-bas-depuis-le-debut-de-l-invasion-20231207 « La dynamique de soutien à l'Ukraine ralentit. Les promesses d'aide ont atteint leur plus bas niveau entre août et octobre 2023 - une baisse de près de 90% par rapport à la même période en 2022 », détaille l'institut, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe le 24 février 2022.
  9. https://theintercept.com/2021/10/27/pentagon-budget-book-spoils-war-andrew-cockburn/ Dans l'introduction de "The Spoils of War", un nouveau livre extraordinaire d'Andrew Cockburn, il fait une affirmation sans détour au sujet de l'armée américaine : "l'efficacité au combat n'est pas prioritaire", écrit-il, "par rapport aux considérations sur les bureaucraties personnelles et internes ... Les militaires ne s'intéressent généralement pas à la guerre, si ce n'est comme moyen d'augmenter leur budget". Cockburn suggère que le Pentagone et les entreprises qui s'en nourrissent ont généré la bureaucratie la plus vaste et la plus byzantine de l'histoire de l'humanité, remplie d'innombrables fiefs bien plus axés sur la victoire sur leurs rivaux internes que sur les ennemis extérieurs. Les généraux et les amiraux d'aujourd'hui ne s'engagent pas dans des activités inutiles comme essayer de gagner des guerres, mais passent leurs journées à comploter sur la façon de rejoindre le conseil d'administration de General Dynamics six heures après leur départ à la retraite. Les lanceurs d'alerte de niveau intermédiaire qui suggèrent que l'armée devrait acheter des casques qui protègent les soldats contre les bombes en bord de route - au lieu d'amplifier les dégâts - sont énergiquement ostracisés. Puis, comme dans le cas de Chuck Spinney, un analyste du Pentagone qui a témoigné dans les années 1980 devant le Congrès sur la montée en flèche des coûts des armes complexes, ils sont punis. (Spinney a réussi à conserver son emploi, mais ses supérieurs ont cessé de lui confier des tâches importantes, ce qui lui a laissé beaucoup de temps pour réfléchir à ses méfaits avant de prendre sa retraite 20 ans plus tard). Cockburn cite judicieusement un concepteur d'armes du Pentagone qui, dans les années 1960, déclarait à ses nouveaux employés qu'ils allaient fabriquer "des armes qui ne fonctionnent pas pour faire face à des menaces qui n'existent pas". L'ensemble des nababs du compendium de Cockburn sur l'avarice et la folie au sommet du monde militaire ressemble donc à une version élargie et hyperviolente de la famille Roy de la série HBO "Succession" - c'est-à-dire qu'ils passent 98 % de leur temps à se disputer la richesse et le pouvoir au sein de l'organisation, et tout au plus un résidu de 2 % à essayer de faire ce que l'organisation est censée être en train d'accomplir. Au cours du premier hiver de la guerre de Corée, en 1950-1951, la moitié des pertes américaines ont été causées par des engelures. Aussi incroyable que cela puisse paraître, les soldats américains n'avaient pas été équipés de bottes chaudes et étaient obligés de faire des raids sur les positions nord-coréennes pour voler leurs chaussures fonctionnelles. Les dépenses militaires américaines avaient bondi après le début des hostilités, mais une grande partie de l'augmentation était destinée à des choses qui n'avaient rien à voir avec la guerre, comme les bombardiers nucléaires stratégiques B-47, un produit Boeing bien plus rentable que d'ennuyeuses vieilles bottes. Plus récemment, en 2014, un bombardier B-1 d'une valeur de 300 millions de dollars a accidentellement largué deux bombes de 500 livres sur cinq soldats des forces spéciales lors d'un raid nocturne près de Kandahar en Afghanistan. En théorie, l'équipage du B-1 aurait dû être en mesure de savoir qu'il s'agissait de troupes américaines, car les forces spéciales portent des balises infrarouges visibles avec des lunettes de vision nocturne standard. En pratique, la caméra de vision nocturne du B-1 détecte une partie différente du spectre infrarouge, et personne n'en a informé l'équipage. Alors pourquoi le B-1 a-t-il été envoyé pour de telles missions, au lieu d'avions mieux adaptés ? Parce que l'armée de l'air avait besoin d'une mission pour les B-1, qui étaient certes très coûteux, mais qui s'avéraient inadaptés à leur mission initiale, à savoir le transport d'armes nucléaires pour les larguer sur la Russie. Avec une pleine charge de bombes, écrit Cockburn, le B-1 ne peut pas voler assez haut pour traverser les Rocheuses.
  10. https://www.lefigaro.fr/international/le-president-allemand-steinmeier-poireaute-une-demi-heure-a-la-porte-de-son-avion-avant-d-etre-recu-au-qatar-20231130 Le 6 novembre dernier, un mois après l'attaque du Hamas, en plein bras de fer avec Recep Erdogan sur la politique israélienne à Gaza, le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, est descendu de l’avion du State Department sans le moindre comité d’accueil pour le recevoir lors de son arrivée à l'aéroport d'Ankara en Turquie. Même les lumières étaient éteintes... Le langage diplomatique ne passe pas toujours par des mots.
  11. https://www.politico.com/news/2023/12/02/swing-state-muslim-leaders-biden-00129758 Des dirigeants musulmans de plusieurs États bascules [c'est à dire ceux où les Républicains et les Démocrates sont au coude-à-coude et où la bataille de l'élection présidentielle est la plus serrée] se sont rendus samedi à Dearborn, dans le Michigan, pour lancer une campagne nationale contre la réélection du président Joe Biden, en réaction à sa gestion du conflit entre Israël et le Hamas. Les organisateurs du Michigan, du Minnesota, de l'Arizona, du Wisconsin, de la Floride, de la Géorgie, du Nevada et de la Pennsylvanie ont baptisé cette campagne "AbandonBiden" et se sont engagés à faire en sorte que Joe Biden ne puisse pas faire un second mandat.
  12. https://edition.cnn.com/2023/08/04/politics/cnn-poll-ukraine/index.html La plupart des Américains s'opposent à ce que le Congrès autorise des fonds supplémentaires pour soutenir l'Ukraine dans sa guerre contre la Russie, selon un nouveau sondage CNN réalisé par SSRS, alors que le public est divisé sur la question de savoir si les États-Unis ont déjà fait assez pour aider l'Ukraine. Dans l'ensemble, 55 % des personnes interrogées estiment que le Congrès américain ne devrait pas autoriser de fonds supplémentaires pour soutenir l'Ukraine, contre 45 % qui estiment que le Congrès devrait autoriser un tel financement. Les républicains estiment dans l'ensemble que le Congrès ne devrait pas autoriser de nouveaux financements (71 %) et que les États-Unis en ont fait assez pour aider l'Ukraine (59 %). Parmi les démocrates, la plupart disent le contraire : 62 % sont favorables à un financement supplémentaire et 61 % estiment que les États-Unis devraient en faire plus. Les indépendants estiment pour la plupart que les États-Unis en ont fait assez pour aider l'Ukraine (56 %) et qu'ils sont opposés à un financement supplémentaire (55 %).
  13. On s'est réconcilié avec l'ancien occupant. On a transigé. On a accepté l'autodétermination de la Sarre. Chose que l'Ukraine refuse pour la Crimée. On a créé une "communauté européenne du charbon et de l'acier". Surtout on s'est mis dans la même alliance militaire que cet ancien occupant. On n'a pas décidé de rejoindre une alliance militaire hostile à cet ancien occupant.
  14. https://www.washingtonpost.com/world/2023/12/05/ukraine-children-russia-qatar/ La Russie a accepté de libérer six autres enfants ukrainiens et de leur permettre de retrouver leur famille en Ukraine à la suite d'une médiation qatarie. La mère d'un garçon de 11 ans du groupe est une soldate ukrainienne détenue comme prisonnière de guerre en Russie, a ajouté le fonctionnaire, qui a parlé sous le couvert de l'anonymat en raison du caractère sensible de la question. Son père est décédé il y a une dizaine d'années et il vivra désormais avec une tante maternelle. Jusqu'à présent, il vivait avec des membres de sa famille dans la région de Donetsk, occupée par la Russie. L'un d'entre eux, âgé de 13 ans, était hébergé par sa grand-mère dans un village de Russie. Grâce au processus de réunification mené par le Qatar, sa mère et lui se sont retrouvés à Simferopol, une ville de Crimée occupée par la Russie. Le couple s'est ensuite rendu à Moscou et se rendra en Ukraine. Un enfant de 15 ans qui vivait avec sa grand-mère sous l'occupation russe dans la région ukrainienne de Zaporizhzhia s'est rendu à Moscou avec un accompagnateur et retrouvera sa mère à Kiev. Un enfant de 8 ans qui vivait avec sa grand-mère dans la région occupée de Louhansk, en Ukraine, a retrouvé sa mère après que le Qatar a facilité le voyage de cette dernière vers Louhansk. Des diplomates qataris ont aidé à escorter la mère et l'enfant jusqu'à Moscou, et ils vont maintenant retourner en Ukraine via la Biélorussie. Deux autres enfants, qui vivent avec leur père et leur sœur adulte en Russie, retourneront en Ukraine avec leur sœur pour retrouver leur mère.
  15. https://www.france24.com/fr/europe/20231206-volodymyr-zelensky-fait-faux-bond-à-un-congrès-divisé-sur-la-poursuite-de-l-aide-américaine-à-kiev Volodymyr Zelensky a annulé sans explication son intervention prévue mardi devant le Congrès américain, en plein débat sur le déblocage de nouveaux fonds pour soutenir l'Ukraine. Cette absence remarquée vient renforcer l'impression d'une frustration grandissante de Kiev face à l'effritement du soutien des États occidentaux depuis l'échec de la contre-offensive ukrainienne et l'éruption de la guerre entre Israël et le Hamas. Plusieurs membres du Congrès ont rapporté des cris et des hurlements lors de la réunion mardi après-midi. Les républicains ont ensuite quitté la salle en bloc. "Ils ont choisi de mettre en péril le financement de l'Ukraine et ils devront tous vivre avec ce choix lorsque Vladimir Poutine marchera sur Kiev et sur l'Europe", a fustigé le sénateur démocrate Chris Murphy. Cet effritement du soutien occidental joue clairement en faveur de la Russie, selon les analystes qui soulignent la résilience de l'économie russe ou encore sa puissance démographique lui permettant d’envisager un conflit de longue durée. https://www.bbc.com/news/world-us-canada-67585902 (6 décembre 2023) "Les États-Unis vont accuser un déficit de plus de 2 500 milliards de dollars cette année", a déclaré Matt Rosendale, député républicain du Montana, à James Coomarasamy, de BBC World Tonight, mardi. "Alors pourquoi le peuple américain devrait-il emprunter de l'argent à la Chine pour le donner à l'Ukraine ? Ce n'est pas dans notre intérêt. https://www.washingtonpost.com/politics/2023/12/05/senate-ukraine-immigration-defeat/ "Si nous disons oui à l'Ukraine, Chuck Schumer n'a aucune raison de travailler sur la frontière. C'est pourquoi cela va de pair", a déclaré le représentant Don Bacon (républicain du Nebraska), un modéré qui a déclaré que ses sondages internes montrent que la frontière est le principal sujet de préoccupation de ses électeurs. https://www.nytimes.com/2023/12/05/us/politics/ukraine-aid-zelensky-congress.html La législation visant à envoyer une aide militaire à l'Ukraine et à Israël est sur le point de s'effondrer, après qu'une réunion d'information ait dégénéré en dispute à la veille d'un vote test crucial au Sénat. Cette débâcle, qui s'est produite à la veille d'un vote test crucial au Sénat sur un projet de loi de dépenses d'urgence de 110,5 milliards de dollars, a non seulement montré clairement que la mesure échouerait, mais elle a aussi sérieusement assombri les perspectives d'un accord bipartisan à brève échéance.
  16. Shorr Kan, je te déteste, car tu viens de tuer ma croyance au fait qu'on peut voir la force de Coriolis dans les baignoires et les lavabos.
  17. J'ai cité le texte de Nikolai Karayev, citoyen russophone d'Estonie, dans Vikerkaar, traduit en anglais sur eurozine, puis en français par moi ici : http://www.air-defense.net/forum/topic/19099-pays-baltes/page/6/#comment-1663778 à Tallinn plutôt non ?
  18. Qui a cédé à qui ? Qui est-ce qui a retiré ses troupes d'Allemagne ? de Pologne ? Qui a condamné du bout des lèvres le bombardement de la Serbie ? Qui a dit amen à la destruction de la Libye par l'OTAN ?
  19. OK. Merci. Je retrouve l'histoire de la force de Coriolis ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gulf_Stream D'autre part, le courant océanique de jet, c'est-à-dire la déviation des vents par la rotation de la Terre ou force de Coriolis, apporte en hiver sur le continent, grâce aux vents d'ouest dominants, de l'air océanique beaucoup plus doux que l'air continental. Donc ce serait plus pour l'air que pour l'eau.
  20. Je t'ai demandé une référence pour ces interviews de migrants syriens. Et tu n'as pas donné de référence. En revanche je peux fournir une référence d'interview d'un migrant syrien qui dit tout le contraire : https://meduza.io/en/feature/2023/12/05/why-have-hundreds-of-refugees-decided-to-try-entering-the-e-u-through-russia (5 décembre 2023) J'ai d'abord rejoint Saint-Pétersbourg depuis Moscou. Ensuite, j'ai payé 100 dollars à un Asiatique et je l'ai accompagné jusqu'au poste frontière de Salla [dans la région de Mourmansk]. Personne ne m'a envoyé vers ce chauffeur, je l'ai trouvé moi-même. Mais à 200 kilomètres du poste frontière, des agents des services de sécurité russes nous ont arrêtés et nous ont dit que nous devions faire demi-tour parce que le poste était fermé. Les personnes qui envoient les invitations [pour les visas] sont des Arabes qui vivent ici [en Russie]. Ils profitent de la situation en Syrie. Je n'ai pas essayé d'aller en Biélorussie. Mes amis qui y sont allés m'ont dit que la situation était catastrophique, que les gens ne pouvaient pas entrer en Pologne et en Lettonie et que l'armée biélorusse les renvoyait à la frontière avec la Russie. Je ne pense pas que la Biélorussie supportera l'afflux de migrants et de réfugiés. Je connais quelqu'un qui a disparu pendant 15 jours. Croyez-le ou non, il venait d'Arabie Saoudite, s'est rendu en Lettonie et a perdu le contact. Quelqu'un l'a ensuite retrouvé dans une forêt en Biélorussie. Le problème est que les gardes-frontières lettons battent parfois les réfugiés, les électrocutent et cassent leurs téléphones [Bumaga note que la torture pratiquée par les autorités lettones a été confirmée par le rapport d'Amnesty International]. Ensuite, les réfugiés sont jetés dans la forêt en direction de la Biélorussie où ils sont perdus pendant plusieurs jours car ils n'ont pas de téléphone. On ne peut s'en sortir qu'à l'aide d'une carte. Le gouvernement biélorusse n'autorise pas les réfugiés à pénétrer dans la forêt, et la police les attrape. Mais les passeurs qui peuvent transporter les personnes à travers les forêts vers la Pologne, la Lettonie et la Lituanie sont un obstacle. En fait, c'est lorsque les gens pénètrent dans la forêt que la souffrance commence. C'est exactement la raison pour laquelle certains réfugiés se sont rendus à la frontière entre la Russie et la Finlande. Ils pensaient qu'il serait plus facile et plus sûr de demander l'asile là-bas qu'en Biélorussie.
  21. Tu remplaces le mot "Russes" par "Américains", et tu as compris la psychologie russe.
  22. https://regard-est.com/paris-fait-pression-sur-skopje-pour-garantir-le-droit-des-minorites-macedoniennes (30 novembre 2023) L’envoyé spécial français pour les Balkans occidentaux René Trokaz a récemment accordé une interview à la chaîne nord-macédonienne Sitel TV. Il y a rappelé la position du président Emmanuel Macron, favorable à l’accélération du processus d’adhésion des Balkans occidentaux à l’Union européenne, et en particulier de celle de la Macédoine du Nord. La « proposition française » consisterait à introduire des changements dans la Constitution nord-macédonienne afin de garantir les droits de plusieurs minorités, dont bulgare, mais ces amendements, qui satisferaient Sofia, ont été bloqués par le plus grand parti politique d’opposition, la formation nationaliste VMRO-DPMNE.
  23. https://regard-est.com/croatie-des-ecoliers-font-le-salut-nazi-pour-commemorer-la-bataille-de-vukovar (28 novembre 2023) Des écoliers font le salut nazi pour commémorer la bataille de Vukovar
  24. Lettonie : https://www.cairn.info/revue-le-courrier-des-pays-de-l-est-2005-6-page-42.htm Emmanuel Droit, « Les russophones entre intégration et repli identitaire », Le Courrier des pays de l'Est, vol. 1052, no. 6, 2005, pp. 42-50. La communauté russophone de Lettonie compte aujourd’hui environ 800 000 personnes, soit 35,3 % des 2,4 millions d’habitants. Elle est constituée à 80 % de Russes de souche issus de différentes vagues de migrations et à 20 % de russophones originaires d’anciennes républiques soviétiques. La communauté russe est profondément enracinée au sein de la société lettone. Dès le XVIIe siècle en effet, le groupe des « Vieux Croyants » - il s’agit d’une dissidence de l’Eglise orthodoxe russe apparue dans l’Empire des tsars après 1650 - trouve refuge en Lettonie dominée alors par les Barons baltes et la bourgeoisie marchande allemande. Durant l’entre-deux-guerres, la communauté russe gonflée par l’arrivée de ceux qui fuyaient la Révolution bolchevique représente numériquement la minorité la plus importante de la jeune république lettone avec près de 10 % de la population, mais elle n’a pas le même poids économique, politique et culturel que les Juifs et les Allemands. Les russophones de Lettonie vivent principalement dans les grands centres urbains du pays où ils constituent soit la majorité, soit une importante minorité de la population. Ils représentent ainsi 56 % de la population de Riga, la capitale (contre 36 % de Lettons) et 85 % de celle de la deuxième ville du pays, Daugavpils, située au sud-est de la Lettonie, à proximité de la frontière avec la Russie. Quant à la jeune génération, elle désire avant tout être intégrée, même si en son sein nombreux sont les mécontents de la politique gouvernementale. Cette communauté n’est pas refermée sur elle-même puisque les mariages avec des Lettons sont relativement fréquents. C’est finalement la langue et l’attachement au territoire letton, considéré comme une « petite patrie », qui unissent ces individus, qui éprouvent peut-être également un sentiment de déception. La grande majorité d’entre eux a approuvé et même soutenu la lutte que la Lettonie a menée entre 1989 et 1991 pour son indépendance, pensant que le nouvel Etat reconnaîtrait leur spécificité. Mais la conviction qu’ils ont été « trahis » et que la redéfinition de leur statut est « indifférente » à tous a cristallisé chez eux au cours des années 1990 le sentiment d’être étrangers dans leur propre pays, même si cela ne s’est jamais traduit par une opposition politique forte ou des tensions interethniques. Au cours des années 1990, les russophones de Lettonie ont eu le sentiment de « payer » pour les deux occupations soviétiques (1940-1941 puis 1945-1991). Alors qu’ils ont été autorisés, dans le cadre soviétique, à voter et présenter des candidats aux premières élections législatives libres du printemps 1990, avec le retour à l’indépendance s’affirme la volonté des élites lettones de recréer un Etat-nation homogène fondé sur un accès très restrictif à la citoyenneté. Or, cette option restauratrice, qui pourtant n’interdisait pas une réglementation plus libérale, comme celle adoptée en Lituanie, refuse la citoyenneté à plus d’un tiers des habitants de Lettonie ? essentiellement des russophones ? qui sont pratiquement devenus du jour au lendemain des « non-citoyens ». Si la législation sur la citoyenneté est correcte sur le plan juridique, elle peut être considérée comme douteuse sur le plan moral dans la mesure où la plupart des russophones ne sont pas directement et individuellement responsables de l’occupation et des crimes du régime soviétique. Le choix fait par les élites politiques lettones en faveur de ce modèle juridique restrictif peut être analysé comme ayant tout simplement pour but d’écarter les russophones de la vie politique, car elles n’ont qu’une crainte, en partie alimentée par la non-maîtrise de la langue lettone par les russophones : la dissolution, voire l’extinction, irréversible de la nation lettone. Selon elles, ce dispositif devait accélérer le départ des russophones de Lettonie et favoriser ainsi la « décolonisation » du pays [le terme « décolonisation » a été employé par les autorités], mais c’était sans compter avec l’attachement de la plupart d’entre eux à ce territoire sur lequel ils sont nés ou se sont installés durant leur enfance. Les autorités russes ont tenté de tirer profit de cette politique exclusive en offrant comme alternative aux Russes de Lettonie la citoyenneté russe en vertu d’une loi de décembre 1991. Environ 20 000 d’entre eux ont saisi cette opportunité entre 1992 et 1994. C’est peu au regard des 100 000 Russes d’Estonie qui ont fait ce choix entre 1992 et 1995. Cela peut s’expliquer en partie par le fait que la loi lettone sur le statut des apatrides de 1994 offre aux russophones non-citoyens une sécurité relative. En Lettonie, la politique d’accès à la citoyenneté évolue progressivement vers une démarche en faveur de l’intégration, essentiellement grâce aux recommandations dispensées par les organisations internationales (mission de surveillance de l’OSCE, Conseil de l’Europe, représentation du Pnud ouverte en 1994). Les pressions européennes, sous forme de rapports et de visites d’inspection, associées à la volonté de la Lettonie d’adhérer à l’Union européenne expliquent le changement de politique. Une nouvelle loi sur la citoyenneté est donc adoptée en 1998 par referendum. Au 1er juillet 2005, les russophones de Lettonie étaient 48,5 % à être citoyens lettons (environ 390 000 personnes), 3,5 % possédaient la citoyenneté russe, biélorusse ou ukrainienne et 48 % étaient encore non-citoyens (dont 75 % de Russes). L’accès à la citoyenneté ne garantit pas pour autant une intégration socio-économique : les discriminations sur le marché du travail, notamment en ce qui concerne l’emploi dans les administrations publiques, sont une réalité tenace. Si le nombre de non-citoyens russophones diminue progressivement, ceux-ci représentent encore un cinquième de la population de Lettonie. Les raisons expliquant le choix de garder ce statut sont à la fois d’ordre psychologique et pragmatique. Face à un discours officiel les excluant, les russophones ont développé au cours des années 1990 un sentiment d’humiliation et de déception eu égard aux promesses de 1989. Mais le statut de non-citoyen leur permet aussi d’obtenir facilement un visa pour se rendre en Russie, sans avoir à craindre une interdiction de revenir en Lettonie. Enfin, ils se montreraient assez réticents à apprendre le letton. La politique linguistique constitue justement un thème très sensible dans cet Etat-nation en reconstruction et en quête d’identité. [La] politique d’« endiguement » de la langue russe a suscité nombre de réactions négatives de la part de la communauté internationale qui ont conduit la Lettonie à adopter une nouvelle loi sur la langue en 1999. Cette dernière a dû être amendée en 2000 pour prendre en compte les critiques exprimées par l’OSCE et le Centre pour les droits de l’homme et les études ethniques concernant la politique linguistique dans le domaine du travail et de la justice. Récemment, le gouvernement letton a assoupli les critères linguistiques auxquels il fallait satisfaire pour être candidat aux élections législatives et municipales : la connaissance du letton n’est plus exigée. Lors du recensement de 1989,21 % des russophones déclaraient connaître le letton (contre 68,7 % des Lettons pour le russe), et en 2000, ils étaient 50 %. Cette augmentation, qui est due à la mise en place de programmes d’enseignement du letton, masque d’énormes différences régionales (essentiellement entre la capitale Riga et la province orientale de Latgale) et générationnelles. La plupart des russophones estiment que le letton est une « langue inférieure » et ne supportent pas l’idée que le russe soit considéré comme une « langue étrangère ». Parler letton n’est souvent pas nécessaire dans le domaine économique, puisque de nombreuses entreprises privées appartiennent à des russophones. Ceux-ci ont donc généralement recours à des interprètes quand ils doivent s’entretenir avec des clients ou des partenaires lettons. Le letton est mieux maîtrisé par les jeunes générations, même s’il faut nuancer l’impact des réformes du système éducatif, d’autant que, dans la sphère privée, il est concurrencé non seulement par le russe mais aussi de plus en plus par l’anglais. Avec l’entrée du pays dans l’Union européenne, la diffusion de la culture de masse anglosaxonne et le développement d’Internet, les jeunes russophones sont beaucoup plus attirés par l’anglais que par le letton. Actuellement, sur un peu plus de 1 000 établissements scolaires, les deux tiers utilisent le letton comme langue d’enseignement, 16,7 % le russe (on compte environ 150 écoles russophones en Lettonie, dont dix à Riga), 14,3 % des écoles proposent un enseignement bilingue en letton et en russe et 0,6 % dans une autre langue (polonais, ukrainien, hébreu). Une enquête conduite dans différents établissements russophones de Riga au printemps 2005 nous a offert la chance d’apprécier la mise en œuvre concrète de cette réforme et la façon dont elle était perçue par les enseignants et les élèves. Cette enquête a montré que les disciplines littéraires vecteurs de la formation de l’identité culturelle, comme l’histoire, sont enseignées en letton. Les quotas sont artificiellement respectés dans la mesure où le sport est également enseigné en letton ! En revanche, c’est le russe qui prévaut toujours pour toutes les disciplines scientifiques. Les directives du ministère letton de l’Education imposent que le letton soit utilisé pour l’apprentissage d’une langue étrangère. Mais la participation à un cours de français a montré que cette matière était enseignée en russe pour la simple raison que les explications de grammaire et de vocabulaire sont plus faciles à assimiler pour les élèves quand elles sont exprimées dans leur langue maternelle. Une large majorité d’élèves ne considèrent nullement cette réforme comme un danger pour l’identité et la culture russes. Cette attitude peut être interprétée comme un signe d’acceptation de la réforme et de volonté de s’intégrer à une société monolingue. Elle reflète surtout une attitude pragmatique : les jeunes russophones ne perçoivent pas comme antinomique le fait d’adopter la langue lettone dans la sphère publique afin de poursuivre leurs études et d’accéder à un emploi, tout en gardant leur identité russe dans la sphère privée. Confrontés à des élites politiques lettones méfiantes et soucieuses de reconstruire l’Etat-nation, les russophones de Lettonie sont sortis progressivement du « ghetto » juridique dans lequel on les avait enfermés au début des années 1990. Leur intégration a été favorisée par l’intervention d’acteurs internationaux qui ont fait pression pour améliorer la politique d’accès à la citoyenneté. A mesure que se rapprochait l’entrée du pays dans l’Union européenne, les gouvernements lettons ont évolué vers une pratique plus inclusive dans le domaine de la citoyenneté. En juin 2005, les autorités lettones ont ratifié la Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur les minorités nationales, mais en appliquant une définition du concept de minorité nationale qui exclut les non-citoyens de Lettonie. De fait, les élites lettones continuent de se heurter aux réticences d’une grande partie des russophones, notamment dans le domaine linguistique, sans que cela ne se traduise toutefois par une radicalisation politique ou par des violences.
  25. https://www.lesechos.fr/monde/europe/legislatives-en-lettonie-les-partis-russophones-degringolent-1853286 (2 octobre 2022) « La guerre en Ukraine a marginalisé les partis dits prorusses, comme Harmonie, qui a eu une certaine importance mais n'a jamais pu faire partie d'une coalition gouvernementale », observe Cécile Bayou, chercheuse associée au CREE (Inalco) et rédactrice en chef du site Regard sur l'Est. Cette fois-ci, Harmonie, qui a déjà perdu la mairie de Riga et n'a récolté que 4,75 % des suffrages (contre 19 % en 2018), ne pourra compter aucun député au nouveau Parlement puisqu'il faut obtenir un minimum de 5 % des votes. Pas plus que l'Union russe de Lettonie, considéré comme pro-Kremlin. Seul Stabilitat! , un autre parti appuyé par une partie de la communauté russophone, a pu passer le seuil avec 6,78 % des voix. « Avec la guerre en Ukraine, la population russophone a été plus ou moins mise en demeure d'affirmer sa loyauté », constate Céline Bayou. Récemment, beaucoup de médias russes dissidents ont été accueillis à Riga, comme Meduza , les services russes de la BBC ou « Novaya Gazeta » dont le directeur de la rédaction a reçu le prix Nobel de la paix en 2021. Mais les portes sont maintenant fermées, les autorités craignant de se laisser infiltrer par des agents du Kremlin. Environ 40.000 Ukrainiens ont été accueillis depuis le début du conflit. Leur connaissance du russe facilite leur intégration. L'administration est en train de favoriser l'acception d'équivalences de diplômes, notamment dans le domaine médical. « Les Lettons sont très absorbés par la question des prestations sociales qu'ils ont peur de voir diminuer au profit d'un budget de la défense qui pourrait augmenter pour représenter 2,5 % du PIB », note Céline Bayou.
×
×
  • Créer...