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La carte militaire


Tancrède
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Certains trouveront que j'aborde un sujet dont certains aspects ont été traités ailleurs, et surtout (pour ceux qui lisent mes trucs) qu'il recoupe certaines de mes obsessions (donnant parfois l'aspect d'une reformulation du même topo); ce sera vrai en partie, mais le fait d'aborder un large problème sous des angles multiples est ce qui permet de le cerner et de le traiter et, une fois encore, seule l'approche historique (et géographique) permet de fournir la quantité de matériel nécessaire (les exemples) pour percevoir des tendances, des schémas, donc des logiques.

 

La carte militaire, c'est l'implantation des bases, ou, plus largement, la façon dont le potentiel militaire disponible (ou développable) se répartit sur le territoire de l'entité politique qui le crée, l'entretient et l'emploie. Enfin, sur son territoire et sur d'autres: zones occupées ou conquises, territoires amis ou en association.... C'est depuis toujours un enjeu crucial pour le niveau politique, autant pour des raisons purement militaires et stratégiques que pour des raisons de politique intérieure (sécurité, éviter les séditions, menaces internes et soulèvements, faire de "l'aménagement du territoire" -donc "distribuer des cadeaux" aux forces politiques dont on veut le soutien), ce qui contraint à un exercice permanent animé par des logiques contradictoires.

Et, évidemment, plus le potentiel militaire est réduit, plus cet exercice est délicat, les logiques "stratégiques/extérieures" appelant à la concentration (et si possible aux frontières ou à l'extérieur, avec éventuellement des réserves "centrales"), et les logiques "politiques/intérieures" appelant à la répartition (sur le plus de territoire possible), les deux ayant de bonnes et de mauvaises raisons pour s'exercer ainsi.

A noter que le cas particulier d'une large conscription (ou conscription universelle) impose de fait une répartition (pour la partie non active de l'armée) qui a l'avantage d'être un compromis plus facile entre les 2 groupes de raisons susmentionnés. De même, le cas de petits pays (ou cités Etat) amoindrit, voire fait disparaître, l'opposition entre ces 2 groupes de raisons, avantage qui cesse quand la dite petite entité devient expansionniste (cf Rome après sa conquête du Latium, Athènes, Thèbes ou Sparte, la Hollande des XVIème-XVIIème siècles....). C'est généralement là que les problèmes commencent: on se pose la question entre armée de métier (voire mercenariat national ou étranger) et conscription, entre concentration et répartition des forces.... Qui impliquent des coûts financiers et politiques très conséquents et très variés, impactant la stabilité et la croissance d'un pays.

 

Le Moyen Age est le cas extrême d'une armée quasiment entièrement de conscription articulée autour d'une caste de guerriers (dont c'est le métier assigné dès l'enfance), ce qui fait de cette caste une "armée de métier" entièrement répartie sur le territoire en micro unités essentielles le plus clair de l'année (allant du petit groupe inférieur à la taille d'une section actuelle au chevalier tout seul), ce qui forme un sommet d'inefficacité militaire et, en l'absence quasi totale d'Etat central, une concurrence interne (devenant politique) entre les dites micro unités (guerres privées, querelles individuelles.... Sans régulation ou régulateur).

 

Selon les cas et les époques, l'organisation de la carte militaire a pu être adaptée ou non: adaptée à la guerre et aux menaces extérieures, adaptée à l'instabilité et aux risques intérieurs; parfois, elle a été adaptée aux deux (plus ou moins bien), et parfois elle a tendu vers une inadaptation plus ou moins complète aux deux (ce qui vient généralement avec le temps, comme le cas du Moyen Age l'a révélé en France, notamment au moment de la guerre de Cent Ans.

La guerre de 1870 a par exemple montré l'inadaptation de la carte militaire (à côté d'autres problèmes) à la défense du territoire: l'armée était calibrée pour des OPEX réduites ou moyennes (pour les grandes, il fallait une situation calme dans le voisinage -qui coûtait politiquement- et une mobilisation douloureuse et non soutenable dans le temps), et pour la lutte contre l'instabilité politique intérieure. Ce double impératif a rendu difficile, voire impossible, de trouver une solution efficace face à une menace importante aux frontières à une époque où la masse comptait proportionnellement plus qu'avant, et où l'évolution technique (le rail, les communications) aggravaient cette menace par le caractère crucial de la mobilisation (le système prussien des années 1860 avait alors atteint un fort rendement en la matière). Malgré les avantages effectifs et potentiels de l'armée française (parmi lesquels ne se trouvait PAS son haut commandement), ce désavantage, reposant moins sur le système militaire (conscription partielle et longue) que sur l'organisation territoriale et logistique, n'a pu être compensé, les Prussiens apportant un écrasant surnombre (d'effectifs, d'unités organisées, d'encadrement) dans l'équation, malgré tout ce qui limitait cet avantage (distance, faiblesse logistique, capacité limitée d'avance, attrition du combat et des conditions matérielles -appros et maladies).

 

Autre exemple; la grande réforme de Colbert/Louvois/Louis XIV a apporté une grande attention à cet aspect (même si ça semble peu visible, comme souvent sur ce sujet, quand on lit des bouquins d'histoire qui se focalisent sur d'autres aspects); la concentration militaire des unités les plus "combat ready" se faisait à proximité des fronts potentiels principaux (pour des actions préventives et une capacité de raid importante en tout début de conflit, à une époque où mobiliser prenait du temps), avec une réserve au centre. On note aussi une poursuite de la politique monarchique depuis les débuts de l'armée permanente, avec la concentration disproportionnée des moyens "lourds" ou à forte valeur ajoutée (cavalerie d'élite, infanterie d'élite, commandement d'échelon "opératique" -essentiellement les grands généraux/aristos et des experts-, et surtout artillerie de campagne) comme réserve centrale, soit autour de Paris. Ce dernier aspect est certes stratégiques (centralité pour "distribuer" les moyens rares sur les fronts cruciaux, avoir une capacité de montée en puissance, mais surtout garder les moyens les plus puissants pour éviter que des chefs locaux aient trop d'idées). Ces développements ont été consubstantiels à la sécurisation du territoire par rapport aux invasions, mais aussi par rapport aux déprédations commises par les armées sur leur propre territoire, tous aspects favorisant la stabilisation de l'Etat: meilleures conditions de vie, discipline accrue, meilleur recrutement, casernements (une nouveauté au XVIIème siècle), meilleur lien "armée nation", création de "couloirs militaires" sur le territoire (distincts des routes civiles pour éviter les ravages accompagnant les armées).... Beaucoup a été couvert.

 

De même, l'histoire romaine démontre une importance plus que cruciale de ce thème, particulièrement quand vient la transition du modèle militaire autour de et après la grande crise du IIIème siècle. La concentration des Prétoriens à Rome, l'absence, puis l'insistance fondamentale sur- des réserves centrales, la disposition de troupes concentrées aux frontières ou des réserves centrales de théâtre (avec juste un "écran" aux frontières).... Sont des aspects permanents de l'histoire romaine.

 

Une dernière logique, qui s'inscrit dans la famille des motifs de concentration du potentiel militaire, est l'importance des grands camps et grandes bases permanentes, soit la réunion en un endroit d'une grande troupe réunissant plusieurs armes/systèmes d'armes: pour former les troupes, avoir un "échelon de gestion" pertinent, mieux former des unités pas seulement aptes au combat, mais à la manoeuvre en bataille et en campagne (donc plus opérationnelles), cet aspect ne peut être ignoré et, s'il n'est pas directement politique (mais a des ramifications politiques: coût, "manque à gagner" politique, crainte d'un soulèvement ou d'une instrumentalisation du militaire, politique locale -le militaire est généralement mal vécu localement), il fait pleinement partie du débat.

 

 

Qu'en pensez vous? Quels sont vos avis sur le caractère crucial de cet aspect des choses? Quels ont été les modèles les plus et moins pertinents (par rapport à leurs époques, leurs situations géopolitiques et circonstances particulières)? Quelles leçons peut-on en tirer pour aujourd'hui?

 

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A mon sens, la carte militaire (comme les choix d'équipements, l'ordre de bataille...) devrait être déterminée uniquement en fonction des missions imparties à cet outil militaire. La tendance récente, où l'outil militaire ne sert plus uniquement à défendre le pays mais aussi à aménager le territoire, faire plaisir à certains élus locaux... est déplorable, même si on peut la comprendre.

 

Même si les développements récents en terme de réseaux de transports et de communication peuvent faire penser qu'elle est devenue secondaire, la géographie reste intimement liée au fait militaire. Je rappelle la citation d'Yves Lacoste (père de l'école française de la géographie) : "la Géographie, ça sert d'abord à faire la guerre".

Modifié par Raoul
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Le basculement progressif du dispositif ADLA du N-E (il y a encore 30 ans la Force Aérienne Tactique se confondait avec la 1ère RA on disait FATac 1ère RA) avec la fermeture de Strasbourg, Reims, Dijon, Cambrai, Colmar, Toul, excusez du peu; vers le sud (montée en puissance de Marsan, Cazaux et Cognac, maintient d'Istres Solenzara et Orange) montre la lente adéquation des structures.

 

Cette lenteur s'explique en partie seulement par des soucis d'aménagement du territoire, mais ces derniers sont anciens et perdre "son" régiment pour une petite ville a toujours été synonyme de catastrophe économique.

 

La professionnalisation est aussi passée par là, on ne maille pas un territoire de la même manière quand on a 150 000 ou 50 000 hommes sous les drapeaux.

 

Enfin pour la première fois depuis des siècles l'ennemi potentiel n'est plus aux frontières géographique qu'on le veuille ou non.

 

Cà change énormément de choses dans l'organisation d'une structure d'autant plus qu'aujourd'hui on ne transporte pas hommes et matériel comme il ya encore 50 ans

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?? Ta question fait suite à mon post ou celui de Tancrède ?

Y. Lacoste n'est pas un auteur contemporain.

 

Au tiens. Tu écrivais que l'emploi de l'armée comme outil d'aménagement du territoire est une tendance récente. Je demandais si c'était si récent que cela. Le cas romain par exemple tout en étant un outil de conquête et de stabilisation, fait de l'armée un outil d'aménagement du territoire et fondateur de villes.

Modifié par Chronos
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Plus encore que ça: croire que la carte militaire n'a pas servi avant aujourd'hui à faire de la politique politicienne, ou à servir des objectifs de pure politique intérieure, ou encore à faire de "l'aménagement du territoire" politique, est plus encore qu'une illusion.

L'exemple romain; entre mille autres, le rappelle:

- la répartition des unités dans l'empire répond aussi à des logiques politiques: éviter notamment autant que possible les provinces à 3 légions ou limiter même celles à 2 était crucial, même si la province était exposé. 3 légions aux mains d'un consul/proconsul (plus les auxilliaires qui vont avec), ça empêche les sénateurs, puis les empereurs, de dormir. AU besoin, le découpage des provinces elle-même, des provinces frontières surtout (puisqu'elles seules sont militarisées), est opéré de telle façon que les impératifs de défense sont pris en compte au même titre que les impératifs de politique intérieure: des portions de front ne devant pas avoir plus que 2 légions, certaines en nécessitant 2 ou plus mais n'en recevant qu'une, avec compensation en unités auxilliaires, peut-être jugées moins dangereuses (efficacité tactique graduellement similaire, mais ce ne sont pas des unités d'échelon opératique).

-  l'intérieur des provinces elles-mêmes, la répartition des garnisons et unités ne correspond pas toujours uniquement à des impératifs stratégiques/militaires

- la grande période de réforme qui suit la crise du IIIème siècle, à partir des années 360 environs (règnes d'Aurélien, puis de Dioclétien) et aboutit au modèle militaire dit tardif, sous le Bas Empire (période dite du Dominat, par opposition au Principiat), prolonge beaucoup de tendances déjà observées avant, particulièrement sous les Sévères. La constitution de réserves centrales (Septime Sévère crée 3 légions sans affectation aux frontières) s'ajoutant à une Garde Prétorienne posant elle-même un problème de "carte militaire" (garde, police, police secrète et réserve militaire, elle a longtemps été la seule unité militaire loin des frontières et près de l'Empereur.... D'où son histoire mouvementée) et dont le volant équestre est progressivement détaché, fusionné avec la garde personnelle des empereurs (la ou les unités qu'il emploie à titre personnel et privé, en tant que particulier) pour donner la base des Scholae Palatina. Cette réforme militaire graduelle des IIIème-IVème siècle, décrite dans d'autres topics, implique aussi un énorme volant d'organisation administrative et géographique: chaque province est divisée en 2 à 3 diocèses (qui sont de fait les nouvelles provinces, surtout militaires) plus petits. Commodité pour une meilleure administration? Impératifs militaires? Peut-être, mais répartition du pouvoir et complication de la tâche de tout révolté potentiel, sûrement. L'évolution de l'armée elle-même, "explosée" en une armée de bataillons permanents et d'EM de différents niveaux (2 EM de niveau "augustien", 2 autres de niveau "césarien", pour les 4 préfectures de l'empire, 3 EM de niveau "magister" pour les groupements palatins, plus une collection de commandements et sous commandements locaux -échelons "dux" et "comes"), semble autant refléter des impératifs politiques que des impératifs opérationnels: certes la croissance des menaces majeures et des sollicitations mineures mais constantes sur toutes les frontières est très importante, et l'effectif global de l'armée ne peut augmenter de beaucoup, ce qui contraint à un usage plus souple et plus fréquent, et à une organisation qui le permet. Re-certes, les différents échelons d'armée et la répartition des rôles répondent à cet emploi (2 réserves impériales de cavalerie d'élite, 3 réserves centrales de troupes palatines, 4 à 5 réserves de théâtre). Mais la répartition, une fois observée même rapidement, révèle la nature profondément politique de cette organisation en échelons successifs.

- l'aspect "aménagement du territoire" au sens strictement géo-économique est de fait, pour l'empire romain, un outil opérationnel: romaniser la zone frontière sur tout le pourtour de l'empire a toujours été un impératif stratégique dès que Rome a eu des provinces outre mer, avant même l'empire qui, lui, systématise cette politique et y consacre de lourds moyens: des provinces frontières aussi romanisées que possible avec une proportion élevée de citoyens romains (et d'Italiens d'origine), sont des provinces plus solides, moins perméables aux mouvements de sédition, aux alliances entre locaux et adversaires au-delà des frontières, mieux organisées et plus mises en valeur (routes, infrastructures....), avec une plus grande assise de réservistes sur place (légionnaires démobilisés et miliciens), donc plus défendables et nécessitant de ce fait moins de soldats laissés en arrière (cela libère plus de troupes en garnisons pour une armée mobile). Et cet aménagement du territoire, à Rome, passe par les armées: ce sont elles qui bâtissent les infrastructures, mettent en valeur la zone.... C'est un emploi opérationnel normal des troupes romaines qui n'ont rien de seulement militaire au sens le plus étroit ("un soldat qui n'est qu'un soldat est inutile" selon Lyautey).

- ne pas oublier que dans toute l'histoire de l'armée professionnelle à Rome, les vétérans et leur implantation (qui dépend en grande partie de leur affectation pendant leur temps de service) sont un problème et un enjeu politique majeur: les vétérans sont plus qu'incités à prendre leur retraite dans leur zone de garnison, pour y constituer une réserve de mobilisation ultérieure, pour contribuer à l'effort de romanisation, ET SURTOUT pour pas faire chier les décideurs et patrons politiques (puis LE patron politique unique qu'est l'empereur après la guerre civile). Un vétéran reçoit la donativa, cad une terre et/ou une stipende en argent (voire une pension); mais c'est la terre qui compte le plus (élément de prestige et de rang social dans la culture romaine, assise, et surtout potentiel de revenu, qui vaut plus qu'une simple somme en argent). Or, évidemment, les terres en Italie (celles que tous voudraient) sont très peu dispo après les guerres civiles (César, puis Antoine, puis Auguste, ont pu caser une proportion donnée de leurs vétérans en Italie sur des terres confisquées aux adversaires, mais c'est limité, et l'usage est peu réitérable); c'est donc en province qu'on refile des terres à tout va pour inciter à l'installation (des soldats, mais aussi d'autres: colons, propriétaires de plus haut échelon....). Non seulement cela remplit l'obligation aux vétérans et sert la politique de romanisation, mais surtout ça éloigne d'Italie (et des centres) des groupements d'individus nombreux, organisés et potentiellement dangereux (habitués à la violence et marqués par elle, prêts à se regrouper et agir pour obtenir quelque chose, voire à se rallier à un général/consul/proconsul ambitieux comme jadis ils suivaient leurs généraux/patrons sous la République finissante). Les masses de soldats démobilisés et en fin de service sont des pans de population dangereux, donc des objets politiques intérieurs.

 

Il n'y a pas, dans l'histoire militaire, une seule répartition de garnisons qui corresponde seulement à des impératifs opérationnels. La période des nationalismes/idéologies et de la conscription universelle en occident (très courte et exceptionnelle sur l'échelle historique: grosso modo de la moitié du XIXème à la fin de la guerre froide) est celle qui nous donne des oeillères parce qu'elle constitue encore pour nous l'alpha et l'omega du domaine militaire: on est nés dedans, l'apprentissage de l'histoire est focalisé dessus (période la plus récente et la mieux documentée), c'est la mémoire récente (transmise par les parents et grands parents).... Et elle est exceptionnelle en ce qu'une bonne partie des impératifs de politique politicienne et de politique intérieure qui co-président à l'organisation d'une armée sur un ou des territoires, sont "masqués" par l'abondance procurée par la conscription universelle (qui procure beaucoup de monde et d'implantations, et contraint d'avoir des bases partout pour le processus de mobilisation) et l'impératif absolument dominant de défense aux frontières (qui maintient l'essentiel des troupes en métropole et contraint l'organisation). Du coup, c'est une période où "y'en a pour tout le monde", ce qui politiquement est plus commode et permet de limiter la concurrence, et donc les sordides querelles paralysant le processus d'organisation territoriale des armées (on peut même "exporter" en Allemagne pendant la Guerre Froide :D .... Surtout certaines troupes "à problèmes").

 

Par ailleurs, les implantations outre mer, en territoires conquis/sous tutelle, ou dans des pays alliés, correspondent aussi souvent, à plus ou moins fort degré, à des motifs de politique intérieure voire de politique politicienne: il y a des lobbies et forces organisées qui entendent obtenir des moyens d'un Etat pour servir leur intérêt particulier. Les lobbies coloniaux, militaristo-industriel (sous diverses formes selon les époques) ou idéologiques poussent ainsi à l'action extérieure (et à la présence outre mer), que ce soit dans l'intérêt évident d'un Etat ou non, et le dit Etat peut ainsi avoir une politique extérieure pas si évidemment dans son propre intérêt que ça, voire pas du tout: voir les USA actuels prisonniers d'une politique d'impérialisme (1/2 million de personnels militaires partout dans le monde) qui n'est plus si forcément dans leur intérêt (rapporte des problèmes de longue haleine, commence à coûter plus que ça ne "rapporte"). La colonisation française de la IIIème République a t-elle été dans son intérêt, au final, hors de 2 ou 3 colonies/protectorat? L'expansion romaine post guerre punique a précipité une crise sociale et politique majeure et croissante de 2 siècles qui l'a affaiblie et foutue par terre, qui n'a clairement pas été dans l'intérêt de la population romaine et juste dans celui des classes supérieures (la classe équestre -la classe sénatoriale n'est créée que plus tard- et la 2ème classe censitaire -où se trouvent les marchands- numériquement très faibles), dont une bonne partie l'a d'ailleurs payé au final dans les guerres civiles et avec l'avènement de l'empire (perte du pouvoir des patriciens et sénateurs, décimation des grandes familles, concentration graduelle du pouvoir).

 

On fait moins attention à ces logiques quand elles coïncident, ou semblent coïncider (à court ou relativement court terme) avec les impératifs plus purement stratégiques/opérationnels d'implantation (et donc d'organisation) des forces, mais elles y sont toujours présentes, à un degré plus ou moins élevé, plus ou moins tolérable. Qu'il s'agisse de lobbies d'intérêt particulier (économique, militaro-industriel, idéologique) ou de politique politicienne (avoir sa base, son implantation militaire -base, infrastructure, rocade/point de passage ou contrôle, ou production de matériel), ou encore d'objectifs de sécurité intérieure (répartir les unités et éviter les dangereuses concentrations, contrôler le territoire), ces logiques sont TOUJOURS là à un degré ou un autre. Et il est très rare qu'elles coïncident avec les impératifs purement militaires/stratégiques/opérationnels: le modèle de forces (surtout la conscription) et l'impératif stratégique du moment (défense territoriale) peut les rendre moins sensibles, et/ou la direction politique centrale peut être suffisamment forte pour imposer sa logique stratégique comme absolument dominante (honnêtement, pour la France, depuis Louis XIV, je vois pas quand ça a eu lieu), mais ce n'est qu'une composante de l'équation qui aboutit à une carte militaire.

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