Le 18 juin et nuit du 18 au 19

Fidèles à leur habitude les Japonais lancèrent dès l'aube leurs hydravions de reconnaissance. Il était essentiel de repérer au plus vite la TF 58 afin de frapper les Américains en limite de portée. Vers 15h30 l'Amiral Ozawa reçut un rapport détaillé de l'hydravion 15, confirmé plus tard par le n°17. La TF 58 fut identifiée à 100 milles dans l'Ouest de Saïpan à 420 milles de la 1ère Flotte Mobile. En fin d'après-midi après concertation avec son État-Major Ozawa ordonna un cap sud-ouest pour conserver un écart de 400 milles. Le but du maître tacticien japonais était de frapper dès le lendemain matin, en dehors du rayon d'action des appareils américains.

A réception du message de l'hydravion 17 le Contre-amiral Obayashi ComCarDiv 3 (Zuiho, Chitose, Chiyoda) décida de lancer sur les Américains. 67 avions commencèrent à décoller à 16h30. C’est alors que survint l’ordre de mettre cap au sud-ouest. Cela signifiait que le raid aurait à atterrir à Guam. Or on avait aucune nouvelle des installations de l’île, régulièrement bombardées. La mission fut annulée.

Les reconnaissances aériennes menées par les Américains dans l'après-midi du 18 manquèrent la 1ère Flotte Mobile de 60 milles. Il faut garder à l'esprit que durant le même temps les appareils de la TF 58 matraquaient les aérodromes et les infrastructures japonaises sur les îles.

Après le raid sur Chichi et Iwo Jima les quatre Task Group achevèrent de se regrouper et Spruance prit alors une décision qui allait s’avérer capitale pour le déroulement de la bataille qui s’annonçait. Il choisit de privilégier la couverture des opérations sur Saïpan.

Spruance décida de recaler les porte-avions vers l’ouest lors de la journée du 18, avant de les rapatrier vers l’est en soirée, peu soucieux lui aussi de perdre sa supériorité dans un combat de nuit jugé par trop aléatoire. Ainsi après avoir fait route à l’ouest sud-ouest sur 115 milles durant l’après-midi , les porte-avions firent cap à l’est nord-est au crépuscule, au moment où le raid lancé par l’Amiral Obayashi aurait pu arriver au contact.

Mitscher pensait qu’il fallait se rapprocher de l’escadre japonaise dont les écoutes électroniques venaient de donner une position à peu près correcte à 300 milles dans l’ouest sud-ouest du point de demi-tour américain. Pour lui, les porte-avions d’escorte pouvaient très bien couvrir le débarquement en cours et assurer les frappes sur les îles.
Spruance après concertation avec son staff décida vers 01h50 de maintenir une route vers le nord-est. Craignant que les écoutes et les observations des sous-marins Stingray et Finback; n’aient identifié qu’une partie de l’escadre japonaise et de risquer d’être débordé par le nord ou par le sud, Spruance joua la prudence en se repliant vers l’archipel. Les Japonais avaient habitué leurs adversaires à opérer selon des plans complexes avec plusieurs escadres réparties sur une vaste zone. Mais là, paradoxalement, ce n’était pas le cas.
Les reconnaissances nocturnes lancées par l’Enterprise, lancées de trop loin, manquèrent l’avant garde d’Ozawa d’une cinquantaine de milles.

Spruance ignorait encore que vers 01h15 un PBM Mariner; arrivé depuis peu à Garapan sur la côte ouest de Saïpan; avait obtenu un contact radar identifiant 40 navires en deux groupes à seulement 300 milles de la position de la TF 58. Son message radio ne fut pas capté. Si le rapport de contact avait été connu au cours de la nuit on peut penser que Mitscher aurait été autorisé à lancer un raid dès le petit matin.