02:58:45 Zulu, Fleuret 2.

[b]Opération Mousquetaire[/b]
[b]24 mars - 02:58:45 Zulu, Fleuret 2.[/b]

Le calculateur du Système de Navigation et d'Attaque avait déterminé l'instant optimal pour le largage des 6 bombes AASM qu'emportait le Rafale. Les cibles, connues à l'avance, avaient été rentrées dans le système avant le décollage, et la séquence de tir était programmée. Le calculateur déclencha l'allumage du témoin de largage, dans la visualisation tête haute.

Le Lieutenant Simon Matou Martineau réagit immédiatement et instinctivement, ainsi qu'il l'avait déjà pratiqué au simulateur. Il tira fermement sur le manche pour amorcer une ressource, tout en poussant la manette des gaz pour maintenir sa vitesse. Puis aussitôt, il pressa le déclencheur MIssiles-Canon-ROquettes-BombES, le « microbe », en égrainant :

[i]« Fleuret 2, bombs away, 1 … 2 … 3 … 4 … 5 … 6, dakota … Mud spot ! Mud spot ! Mud spot ! Music on»[/i]

Au fur et à mesure que les six bombes propulsées avaient été éjectées de l'avion, alors que l'altitude augmentait, les indicateurs de menace de SPECTRA avaient viré au rouge. Le tableau des menaces s'était rempli à une vitesse affolante et chaque ligne rapportait l'échec du brouillage des sources hostile car elles étaient trop puissantes et trop proches. Le système avait repéré le radar de poursuite d'une station de missile Sol-Air, ainsi que deux conduites de tir de canons guidés anti-aériens.

Matou, son avion allégé, n'envisagea qu'une seule option pour son salut : replonger vers le sol en gardant un oeil sur le tableau des menaces afin d'être prêt à réagir en cas de verrouillage d'une conduite de tir. Il ne vit donc pas ses bombes, lancée sur une trajectoire parabolique, allumer leur propulseur à poudre pour augmenter leur allonge et piquer droit sur leur objectif.

A bord de Fleuret 1, le Capitaine Sophie Sigma Sarracci avait accompagné la ressource de son ailier. Elle aussi avait vu les alertes, mais elle y était prête. Le calculateur de son SNA n'avait aucun objectif prédéterminé. Il accepta donc aussitôt les données fournies par SPECTRA. Le système d'auto-protection avait déterminé l'azimut de toutes les menaces, et la méthode interférométrique avait fourni suffisamment d'information de distance pour calculer une solution de tir. A son tour, elle pressa le « Microbe » à trois reprises :

[i]« Fleuret 1, Bombs away, 1 … 2 … 3. »[/i]

Puis elle replongea vers le sol tout en gardant son OSF braqué dans la direction de la plus importante des menaces, le radar de guidage des SAM. Il ne restait plus qu'à compter sur l'efficacité du leurrage, en cas de tir de SAM, le brouillage étant insuffisant.

Conformément aux instructions du briefing, les deux avions entamèrent un large virage de contournement de l'objectif, afin de rester à portée de leurs capteurs et d'éviter un passage direct au dessus des défenses adverses. Cela leur permettrait de vérifier l'impact de leurs tir, mais donnerait aussi à Sigma la possibilité de larguer ses trois dernières AASM sur un objectif d'opportunité.

[b]Al Khafrah Air Field[/b]
[b]24 mars - 02:59 Zulu, Bureau du commandant de base.[/b]

Le Général Bedaz El Mourad venait de sortir de son bureau et allait s'engager dans l'escalier qui le conduirait au Bunker de commandement, 5 mètres plus bas. Il avait encore la main sur la poignée de la lourde porte capitonnée lorsque le premier missile frappa la base.

Le missile Scalp pénétra dans le bâtiment de commandement par la fenêtre du bureau du Général, celle là même devant laquelle il se tenait une minute plus tôt. Dans un éclat de verre brisé sous l'impact, les ailes se brisèrent en emportant des fragments du mur de brique. Le corps du missile se disloqua, répandant le carburant qui lui restait dans la pièce et sur la façade, tandis que la double charge explosive tandem de 400 kg, avec sa coiffe protectrice durcie, continuait sur sa lancée et se fichait profondément dans le plancher qui recouvrait le dôme de béton du bunker.

Moins d'un dixième de seconde plus tard, une terrible déflagration retentit et un nuage de fumée noire et de poussière enveloppa la totalité du bâtiment. Le général reçu de plein fouet la porte capitonnée de son bureau, dégondée par l'explosion, et fut projeté dans l'escalier attenant, sous une cascade de gravas. Dans le Bunker de commandement, l'explosion, double en fait, perfora la couverture protectrice d'un trou de près d'un mètre de diamètre. La surpression de la détonation et le flot de gaz brulants dans une atmosphère confinée provoquèrent des lésions pulmonaire instantanée aux contrôleurs tactiques et aux opérateurs radio présents. La plupart moururent immédiatement de ces lésions barotraumatiques. L'ensemble du bâtiment commença à s'effondrer vers le trou béant creusé en son milieu, et déjà quelques flammes commençaient à en lécher les parois.

Au même instant, à l'autre bout de la base, le second Scalp lancé par Rapière Leader atteignit aussi sa cible. Il frappa, en son milieu, le monticule de terre qui recouvrait le principal dépôt de munitions de la base. La première explosion fût terrible. Elle éventra l'abri, projetant caillasses et fragments de béton à plus de trois cent mètres à la ronde. La seconde explosion fut apocalyptique. Les bombes et les missiles du dépôt furent éparpillés alentour. Certains, bien que non armés, explosèrent sous le choc, multipliant le chaos. Les pains de poudre des propulseurs de missiles s'enflammèrent, ajoutant des gerbes de flammes blanches dans le panache incandescent de fumée, ponctué de détonations secondaires.

Du même point de l'horizon surgirent les deux missiles Apache largués par Rapière 2. ils infléchirent légèrement leur course afin d'aborder la piste sous un angle de 10 ° par rapport à l'axe. Ecartés de près d'un kilomètre l'un de l'autre, en vol parallèle, ils éjectèrent la coiffe recouvrant leurs charges KRISS et commencèrent à les disperser selon la séquence prédéterminée : d'abord des charges à explosion immédiate. Les deux premières explosion eurent lieu juste à côté de la piste. Elles furent suivies de trois coup au but pour chaque apache, et d'une nouvelle paire d'explosions en bordure de piste. Les cinq dernières charges de chaque missile était à retardement. Elles allèrent se ficher avec plus ou moins de bonheur dans les taxiways et les parkings attenant de la base, en interdisant durablement l'usage : elles exploseraient, aléatoirement, une à douze heures plus tard, occasionnant de nouveaux dégats. Poursuivant sur leur lancée, les deux carcasses vides des missiles s'écrasèrent, un kilomètre au delà de l'enceinte de la base, dans l'embrasement de leur reliquat de carburant.